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« Le Détroit du Loup », « Le Dernier Lapon », « La Montagne Rouge » : trois enquêtes passionnantes écrites par l’écrivain-journaliste Olivier Truc, menées par deux officiers de la police des rennes : Klemet et Nina.

Cette police, créé à l’origine en 1949 par l’Etat norvégien suite à des vols incessants de rennes dûs à la à famine causée par la politique de la terre brûlée des troupes allemandes, a toujours pour fonction de prévenir les conflits liés à l’élevage de ces animaux.

Par le biais de ces investigations, Olivier Truc nous entraîne sur les terres du Grand Nord et à la rencontre de ses habitants : les samis (lapons). Trois romans totalement dépaysants dont le suspens explore le quotidien de ce petit peuple européen que nous connaissons mal : si « le Détroit du loup » évoque davantage la problématique des plongeurs en haut profonde des années 60, les deux autres récits « le Dernier Lapon » et « la Montagne rouge » posent la question de l’identité des lapons, du respect des traditions dans un monde en constante évolution et de leur cohabitation difficile avec les norvégiens.

Né à Dax, Olivier Truc habite Stockholm depuis 1994. Journaliste, il est le correspondant du « Monde » pour les pays nordiques et baltes. Il est aussi documentariste pour la télévision.

« Le Dernier lapon » a reçu plus d’une quinzaine de prix dont le prix Quais du Polar 2013 et le prix Mystère de la critique 2013.

Virginie Hours : vous êtes journaliste en Suède depuis 20 ans, comment avez-vous découvert l’existence de cette « police des rennes » ?

Olivier Truc : Lorsque je travaillais pour le quotidien français Libération en 2004, j’avais fait une série de reportages sur la police des rennes dans lesquels je racontais les coulisses de la vie du Grand Nord en utilisant les affaires traitées par cette unité. C’était un angle d’écriture qui m’avait plu car je cherchais une façon insolite et décalée de décrire les problèmes qui se posent dans cette région. Ensuite, un producteur parisien m’a demandé de faire un documentaire sur la police des rennes pour France 5.

VH : Pourquoi en faire un roman ?

OT : J’avais envie d’y retourner par le biais de l’écriture car j’avais plein d’histoires que j’avais ramassées au cours des enquêtes. C’était aussi une bonne matière pour parler de cette région qui est peu médiatisée, en tous cas hors de Scandinavie. Au début, je voulais faire un livre de reportage mais ça a dérapé en polar. Je pense qu’après avoir écrit deux livres d’enquête (« l’Imposteur » et « Dykaren som exploderade ») qui mêlaient style journalistique et style narratif, mon écriture était mûre. J’ai donc franchi le pas.

VH : Les personnages de Klemet et Nina, fiction ou réalité ?

OT : Klemet Nango est sami, Nina Nansen vient du sud de la Norvège. Or, pour Libération, j’avais suivi un couple de policier assez semblable : une jeune femme sortie de l’école de police et un sami-norvégien qui connaissait parfaitement le Grand Nord. Les autres personnages sont un mélange de ceux que j’ai connus et rencontrés.

VH : Dans une précédente interview, vous expliquez que cette région intéresse peu les journalistes alors que c’est une des raisons du succès de vos livres. Pourquoi ?

OT : Pour beaucoup de journalistes nordiques, c’est une région qui est lointaine et où il ne se passe rien. Il y a des rennes, des forêts, des samis, mais aucun grand dossier. A Stockholm, même s’ils sont ouverts et cultivés, les gens sont tournés vers le Sud, le soleil, pas le Grand Nord. La question des minorités est aussi un sujet sensible  sachant qu’il y a des lobbys forestiers et miniers très puissants là-haut. Les samis ne les concernent pas, à l’école on enseigne peu de choses sur eux. Et puis, ils ne sont que 20 000 en Suède (50 000 en Norvège). Donc, ça m’a titillé car généralement je suis attiré par les sujets qui n’intéressent pas les gens.… Et ça a été un jackpot !

VH : Est-ce que ces livres vous donnent une certaine responsabilité ?

OT : J’ai été contacté il y a peu par un éleveur sami qui est également chef d’un clan. Il m’a demandé de le mettre en contact avec un suédois qui pourrait s’intéresser à leur histoire : en deux mois, ils ont perdu 200 rennes percutés par des voitures. C’est un problème énorme. Ils se sentent oubliés, méprisés… et ce n’est pas la première fois qu’on vient me demander de relayer une information

VH : Pensez-vous devenir un porte-parole de leur cause à travers vos livres ?

OT : Porte-parole non, car je ne vis pas leur vie et je ne suis pas sami. Mais je suis un témoin… il y a des situations qui m’interpellent,  notamment le décalage entre l’image des pays nordiques à l’étranger et la réalité des minorités qui les habitent. Il est clair qu’il vaut mieux être une minorité en Europe du Nord qu’en Amérique du Sud ou en Australie mais il ne faut pas croire que tout se passe bien. Ils sont menacés.

VH : Prévoyez-vous un quatrième opus ?

OT : J’avais prévu d’écrire uniquement « le Dernier lapon » mais en détaillant le synopsis, plein d’idées me sont venues et donc l’envie également de faire une suite.

J’imagine un cycle qui se passe en Laponie composé de cinq polars de la police des rennes et de deux romans historiques. Donc mon sujet actuel est historique, se passe aux XVIIème siècle et parle de la colonisation de la Laponie par les suédois à travers le personnage d’un cartographe français. Dans ce récit, il y aura des passerelles avec « le Dernier lapon » et « la Montagne rouge ».

Le Dernier Lapon, Paris, Métailié, 2012

Le Détroit du loup, Paris, Métailié, 2014

La Montagne rouge, Paris, Métailié, 2016