Portrait de Sarah Watson ©Michael Crook, 2021
Sonia Jebsen – octobre 2022
C’est dans l’atelier A 108 de la Fondation Esp’Asse à Nyon que l’américaine Sarah Watson a pris ses quartiers depuis quelques années. Sa première exposition solo présente une série de paysages abstraits ainsi que des sculptures céramiques dérivées de ses toiles. Architecte de métier, l’artiste transpose dans ses derniers travaux ses préoccupations en lien avec les bouleversements climatiques.
Née à Providence (Rhode Island), Sarah Watson intègre la célèbre Université de Yale d’abord en section arts visuels (1996-2000). Aux Etats-Unis, le figuratif fait son « come back » fin des années 90. Sarah Watson découvre notamment les peintres abstraits Lisa Corinne Davis et Peter Halley. Durant des séjours à New-York, l’étudiante découvre l’art contemporain dans les galeries new-yorkaises, visite les expositions du MOMA et du Whitney Museum. Elle avoue un fort penchant pour les artistes Saul Steinberg et Joan Mitchell. « Les artistes dont je m’inspire plus directement sont: Jo Baer et son minimalisme, les objets de Richard Artschwager, ou bien l’artiste-céramiste Ron Nagle, que j’ai découvert récemment. » précise Sarah Watson.
Après la peinture, Sarah s’oriente vers l’architecture, toujours à Yale (2001-2004). Parmi ses enseignants, deux têtes d’affiche, Peter Eisenmann et Frank Gehry, adeptes du formalisme. De Gehry, elle apprend à valoriser la beauté et la légèreté. Auprès d’Eisenmann, elle acquiert la rigueur dans la démarche. Son diplôme en poche, elle atterrit à Londres où elle travaille chez Dixon Jones architects. Elle a pris part à la réalisation de projets d’envergure tels que « Exhibition Road » (South Kensigton) ou Chelsea Barracks.
Curieuse professionnelle, Sonia part toujours un appareil photo à la main, pour partager les beautés de la région ou sa passion pour l’art et les artistes.
En 2013, Sarah Watson s’installe à Nyon avec sa famille et relance son activité artistique développant petit à petit un style bien à elle. « Mon travail prend sa source dans ma formation, mais ne se réfère a aucun courant spécifique d’architecture. » Les paysages artificiels dévoilés dans l’accrochage nous laissent pensifs et soulèvent en nous de nombreuses réflexions. Que voyons-nous ? Sur des fonds colorés et vaporeux , des formes parfaites sont disposées comme en suspension. Elles semblent sortir tout droit de plans d’architecte mais vouloir échapper à toute maîtrise, à tout emplacement déterminé.
« Mes paysages abstraits arborent des couleurs spécifiques inhérentes aux formes et aux éléments que je conçois « , explique l’artiste.
» Sarah Watson peint sur des panneaux en bois fabriquées de ses mains. « J’aime que le tableau existe tel un objet », avoue t’elle.
Si abstraites qu’elles soient, ses oeuvres s’inspirent des scènes de la campagne nyonnaise. Vignobles et vergers tendus de filets protecteurs décrivent des plans réguliers, où les formes se multiplient à l’identique.
Les dernières peintures de Sarah Watson portent-en elles, l’angoisse de l’artiste face aux catastrophes naturelles ravageant les Etats-Unis chaque année.
Les incendies dévastant les collines de Californie ne peuvent la laisser insensible : des membres de sa famille vivent dans ces régions exposées.
Les photos de presse et les vues aériennes qu’elle regarde avec tristesse la conduisent à un constat amer : les dégâts causés par la main de l’homme laissent des cicatrices indélébiles.
En parallèle de sa peinture, Sarah se mue en céramiste pour créer des formes planes en grès lisse. Habillés d’une couleur pimpante, ils semblent s’être échappés des tableaux.
Posés à plat sur une planche de bois, ils se rebiffent, se tortillent, manifestant leur refus d’être domptés…. un vent de désobéissance souffle sur cet accrochage pensé dans les moindres détails avec l’aide de son voisin d’atelier, le peintre abstrait Pierre Schwerzmann.