Juin 2017 – Sophie Bernaert
Quand on passe la porte de cette épicerie pour venir y chercher un colis, difficile de partir aussitôt et surtout de ne pas oublier ce pourquoi nous étions venus…
On ne qualifierait pas vraiment le petit village de Bossey, au pied du Salève, à quelques centaines de mètres à peine de la frontière suisse, de lieu de passage. Mais alors, quelle drôle d’idée d’y avoir créé un commerce de « non nécessité »… Et pourtant, en octobre 2011, quand Jacqueline et son mari, le maire du village, se lancent dans ce projet, l’idée première est de refaire vivre le lieu avec une épicerie proposant des produits de base, en dépannage.
Elle évoque alors le souvenir familial de l’épicerie de ses arrières-grand-parents à Cruseilles: « vous savez » me dit-elle, » à l’époque où on puisait dans des sacs en vrac, remplis de denrées alimentaires ». Mais très rapidement, sa grande curiosité pour les produits de bouche, ses talents de négociatrice, (elle dit avoir « une véritable passion pour les achats »), ses années d’expérience dans l’univers de la décoration et son « côté terre », qu’elle revendique sans cesse, l’amènent tout naturellement vers d’autres cieux…
Jacqueline travaille avec une cinquantaine de fournisseurs, mais ici, aucun nom de la grande distribution. De nombreuses étiquettes de producteurs locaux côtoient celles en provenance de contrées plus lointaines… Rien ne l’arrête pour dénicher « le bon produit ».
Quand on lui demande de nous parler de ses derniers coups de coeur, elle évoque sa rencontre avec Margot, ses sucres, gelées et élégants flacons de sirop d’érable d’une petite production bio en provenance directe du Québec.
Il y a aussi ce « cultivateur-cuisinier » approché lors d’une journée « portes ouvertes » de fermes locales, qui propose de délicieuses confitures, soupes et terrines. Jacqueline ne connait jamais à l’avance le contenu de sa livraison, car tout dépend de ce que la terre lui aura donné. Rien n’est figé à l’Épicerie de Bossey, l’offre évolue sans cesse, au fil des saisons, des rencontres et des envies.
À l’heure de notre rendez-vous, elle est arrivée les bras chargés d’un cageot de fraises fraichement cueillies par un producteur tout proche, ravie d’apprendre que les premières framboises seraient pour la semaine prochaine.
Car le « frais » a aussi la part belle dans cette épicerie. Des fromages locaux de la coopérative familiale créée par le père de Jacqueline se partagent la vedette avec une délicieuse charcuterie à la coupe, très variée. Une mortadelle à la truffe se rappelle régulièrement à mon bon souvenir… Sa saveur et son moëlleux seront d’ailleurs les plus beaux atours d’un gressin fait main, beurre ou huile d’olive… Oui, le meilleur de l’Italie est aussi ici.
On se sent juste bien dans cette épicerie. Tout est en harmonie. Dans une petite surface, l’offre abondante de produits est élégamment présentée.
Passionnée de vins, Jacqueline propose aussi des nectars d’une grande qualité, avec une préférence pour des vins italiens, bio pour certains et dans une gamme de prix très raisonnable.
« Mais mon plus grand plaisir », dit -elle, et là son visage s’illumine encore plus, « c’est de voir de plus en plus de gosses du village venir après l’école chercher leurs petites douceurs « …oui, c’est aussi ça l’Épicerie…
La petite place du village de Bossey n’est peut-être pas un lieu de passage, mais une chose est sûre, Jacqueline aura réussi, en seulement quelques années, à en faire une étape incontournable pour tous les gourmets avertis de ce côté du lac…