Virginie Hours
Rendez-vous le 16 décembre de 9h à 15h15 au jardin anglais.
Le 16 Décembre, la Coupe de Noël va souffler ses 80 bougies !
Tout commence à Paris en 1905 lorsque pour la première fois, le journal L’Auto organise la Traversée de Paris à la nage. C’est une course de nage en eau libre qui fait 11,6km et va du pont National au Viaduc d’Auteuil. Elle rencontre le succès mais attire surtout les professionnels. C’est pourquoi, des épreuves amateurs sont ensuite organisées par la S.N.E.N. (Société Nationale d’Encouragement à la Natation) puis à partir de 1922, par la F.F.N.S. (Fédération Française de Natation et de Sauvetage) qui encadre une traversée de Paris concurrente et qui sera la seule à subsister à partir de 1931.
Le suisse René Doria assiste à une des éditions et décide alors d’organiser une compétition équivalente à Genève. On est en 1934 et René Doria est non seulement membre du Cercle des Nageurs de Genève (ancêtre de Genève Natation 1885) mais également gérant de l’entreprise Pâtes et biscuit Doria (ancêtre des boulangeries Pouly). Il va donc utiliser ses moyens et ses relations pour lancer la première manifestation qui rassemble dix courageux qui nagent entre le pont de l’Île et la passerelle de l’Île.
80 ans plus tard, la Coupe de Noël existe toujours et constitue un des rendez-vous incontournables du mois de décembre sur Genève !
Attention : la course n’a pas eu lieu en 1938, 1939, 1940 ainsi qu’en 2001 et 2009 à cause des conditions météorologiques, ce qui explique le décalage de 5 ans entre l’année de sa création et son anniversaire…
Cette année, la Coupe de Noël organise deux courses :
- la traditionnelle sur 120 mètres ;
-
l’exceptionnelle (on la compare gentiment à la course du duc qui a lieu tous les quatre ans à l’occasion de la course de l’escalade) sur 444 mètres.
Le parcours sera modifié puisque le départ aura lieu depuis le Jet d’eau et passera près des Pierres du Niton pour terminer (traditionnellement depuis 1994) au Jardin anglais. Les organisateurs attendent des spécialistes de la nage extrême sur le parcours des 444 mètres, dont Jacques Tuset.
La manifestation se tiendra de 9h à 15h15.
La coupe de Noël en chiffres en 2018 :
- 460 nageurs(-ses) en compétition
- 80 nageurs(-ses) pour la longue distance de 444m
- 1760 nageurs(-ses) en humoristique
- 1 Père Noël
- 55% d’hommes et 45% de femmes
Jacques Tuset qui a participé aux championnats du monde d’Ice Swimming en 2017 sur 1000 mètres a accepté de s’aligner sur la distance de 444 mètres. Ce lyonnais de 55 ans est un spécialiste de la nage en eau libre et du sauvetage côtier et figure parmi les 50 nageurs en eau libre les plus aventureux au monde selon le magazine « World Open Water Swimming ».
Entretien.
Virginie Hours : Quand et pourquoi avez-vous commencé à nager en eau libre ?
Jacques Tuset : J’ai appris à nager en 1971 dans le port de Canet dans une piscine faite de troncs d’arbre. C’est dans ce bassin que j’ai fait mes premières brasses au milieu des poissons, du plancton et des méduses, dans une température de l’eau changeante au grès de la météo de 15°C à 23°C. En 1972, je réalise ma première traversée à la nage dans le port de Canet et je prends vite pris goût à ce type d’effort. Depuis, j’ai effectué à la nage plus de 400 traversées.
VH : Quand l’intérêt pour la nage en eau froide est-il venu ?
JT : Depuis une trentaine d’année, je participe à de nombreux bains de noël et bains du nouvel an. J’ai aussi effectué de nombreux raids ainsi que des courses marathons dans des eaux parfois à 12°C et j’ai fini par ouvrir une section de nage en mer à Montpellier au club d’Aqualove il y a 3 ans. Et l’eau froide fait parti des principaux objectifs que j’ai mis en place au sein du groupe.
VH : Qu’est-ce qui vous attire dans cette discipline ? Quelles sont les sensations que vous aimez retrouver ?
JT : Ce qui m’attire le plus dans cette discipline, c’est son esprit de convivialité car il s’agit d’un challenge où l’on se motive les uns les autres. C’est comme une grande famille ! L’objectif est de réaliser quelque chose qui semble être hors normes et qui avec de la pratique et de la préparation peut-être sans danger si l’on respecte certaines règles… Ce que j’aime aussi sur des courtes distances, c’est cette sensation de zénitude. Lorsque je reste longtemps dans l’eau froide, je ressens un sentiment de bien-être, voire d’euphorie. C’est le moment où sur le plan cérébral, sont sécrétées de la cortisone et de l’adrénaline. Mais il faut éviter ensuite de prolonger…
L’eau froide stimule aussi le système immunitaire et les maladies hivernales deviennent rares.
VH : Pourquoi participer cette année à la Coupe de Noël à Genève ?
JT : J’ai participé pour la première fois en 1998 à la 60ème coupe de Noël. Je l’ai ensuite faite quatre fois en tant que compétiteur et trois fois dans un cadre humoristique. Vingt ans après, je reviens pour la 80ème édition avec cette année la nouvelle distance de 444m.
VH : Quelle préparation particulière suivez-vous ?
JT : Toute l’année, je nage au moins une fois par semaine en mer quelles que soient les conditions. J’essaie de trouver aussi des lacs dans la région pour m’habituer et m’amuser. Avec le temps et une bonne préparation, il est possible d’adapter le corps à devenir moins sensible au froid. Mais je ne nage jamais seul, toujours avec le groupe du club afin d’avoir une sécurité permanente.
VH : Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent se lancer dans la nage en eau froide ?
JT : La qualité essentielle pour pratiquer cette discipline est « l’énergie mentale. » En effet, la clef de la réussite repose sur la lucidité et sur le respect de strictes règles de sécurité. Il faut bien se connaître dans son corps et dans sa tête.
D’abord il faut consulter un médecin pour s’assurer qu’il n’y a pas de contre-indications à la pratique de la nage hivernale. Ensuite, il faut se mettre à l’eau en effectuant quelques baignades pour s’accoutumer à l’eau froide. Il faut y aller progressivement car une bonne connaissance de soi et du milieu est la meilleure des préventions. Peu de sports sollicitent le corps et l’esprit de façon aussi extrême et pour pratiquer cette activité, il faut une énergie mentale énorme et surtout respecter des règles de sécurité : toujours être à l’écoute de son corps et surtout ne jamais nager seul. Même le corps le mieux entraîné peut avoir des défaillances !
Après, ce que je déteste et que chaque nageur va connaître sur des longues distances et au-delà de cinq minutes dans des eaux très froides, c’est la longue lutte qu’on entame pour se réchauffer après la nage. Car on consacre la moitié de l’effort à la course elle-même et on réserve l’autre moitié de l’effort à la phase de récupération. C’est « l’after drop » qui permet au corps de remonter en température !