© Competencia oficial
Virginie Hours – mai 2022
En mai, va voir ce qui te plaît ! La programmation est riche et variée.
Bythelake propose de vagabonder entre différents styles : une saga familiale (Downton Abbey), un hommage à un grand artiste (L’ami, portrait de Mix et Remix), un appel aux grands espaces (The sanctity of space), le destin contrarié de trois jeunes filles (La colline où rugissent les lionnes) , une excellente satire du milieu artistique (Competencia official) et un huis-clos genevois (Une histoire provisoire).
« The sanctity of space »
« Downton Abbey « de Simon Curtis
Avec Michelle Dockery, Maggie Smith, Tuppence Middleton, Hugh Dancy
Sortie France Suisse romande et Suisse alémanique : 26 avril 2022
« Downton Abbey », le retour de nos amis Crawley
La famille Crawley vivrait une période bénie s’il n’y avait le toit du château à refaire et la permanence des soucis financiers. Heureusement, deux nouvelles changent la donne : un réalisateur hollywoodien souhaite tourner un film dans la demeure contre une grosse somme d’argent et Lady Violet hérite d’une villa dans le sud de la France. Tandis que Mary, dorénavant vrai capitaine du navire, reste à Downton Abbey pour gérer les relations avec l’équipe de tournage, Lord et Lady Grantham et les autres décident de se rendre sur la Côte d’Azur pour découvrir la villa et leurs propriétaires.
« Les anglais arrivent » clame le majordome Carson en préparant son départ pour la France. Ainsi peut se résumer la nouvelle intrigue de notre famille aristocratique britannique préférée. Si le film en 2019 avait déçu, celui-ci répond aux attentes des inconditionnels. Les décors et les costumes sont toujours magnifiques et les répliques savoureuses. Le scénariste est de nouveau Julian Fellowes, ce qui se sent dans le rythme plus saccadé de l’histoire. Sans surprise, cet épisode met l’accent sur le temps qui passe et la nécessité pour chacun de s’adapter aux changements pour survivre. Reste que la dernière scène émeut et sonne comme l’adieu à une belle époque et à des amis personnels.
« L’ami, portrait de Mix et Remix » de Frédéric Pajak
Sortie Suisse romande : 5 mai 2022
« Mix et Remix » ou la force du dessin
Qui se cachait derrière les personnages minimalistes de Mix et Remix ? Quelle personnalité avait ce regard critique sur l’actualité et les décryptait en trois traits de plume ? Le dessinateur Frédéric Pajak lève un coin du voile…
Frédéric Pajak et Philippe Becquelin étaient des amis de longue date. Philippe Becquelin plus connu sous le nom d’artiste Mix et Remix, est décédé en 2016. Ce documentaire est un bel hommage à une personnalité étonnante mais aussi à une amitié sans faille. « Tu uses d’un minimum de traits et chaque trait est à sa place » reconnait Frédéric Pajak avec admiration. A travers des documents familiaux, de nombreuses interviews, des dessins, Frédéric Pajak nous raconte la vie de Philippe Becquelin, de ses débuts aux beaux-arts, à ses relations avec la politique jusqu’à la reconnaissance. « J’adore susciter les débats. Je peux dire tout et son contraire en une soirée » disait ce dernier. Pourtant une forme de regret pointe à la fin de sa vie, son succès l’a peut-être empêché de devenir l’artiste qu’il souhaitait être.
Un très beau documentaire sur un trublion qui nous manque.
« The sanctity of space » de Renan Ozturk et Freddie Wilkinson
Sortie Suisse romande et Suisse alémanique : 5 mai 2022
« The sanctity of space » ou la passion de l’impossible
En 1936, le cartographe américain Brad Washburn monte dans un avion et photographie le plus haut sommet d’Amérique du Nord (connu sous le nom de mont McKinley ou Denali). Quatre-vingts ans plus tard, les alpinistes Renan Ozturk et Freddie Wilkinson découvrent ses photos et décident de tenter une première : traverser latéralement les sommets du massif de Moose’s Tooth en Alaska.
Les documentaires racontant des ascensions difficiles sont de plus en plus fréquents. On garde en mémoire l’excellent Free solo ou la référence Meru. A leur tour, Renan Ozturk et Freddie Wilkinson veulent partager avec nous l’obsession qui les a poursuivis pendant plus de 5 ans : traverser de manière latérale le massif de Moose’s Tooth. Sans masquer les difficultés financières et sentimentales, ils racontent les temps d’approche, les tentatives infructueuses, la difficulté de vivre de leur passion. Les images sont magnifiques et souffle un vent d’aventure. Malheureusement, le film est irrégulier. En créant des parallèles incessants entre leur quête et l’histoire du photographe Brad Wahburn et de son épouse Barbara, ils brouillent leur parcours et rendent leur récit peu fluide . C’est dommage.
Un film à voir définitivement sur grand écran.
« La colline où rugissent les lionnes » de Luàna Bajrami
Avec Flaka Latifi, Uratë Shabani, Era Balaj
Sortie France : 27 avril 2022
Sortie Suisse romande : 5 mai 2022
Sortie Suisse alémanique : 18 août 2022
« La colline où rugissent les lionnes », le Kosovo à l’honneur
Lena, Li et Qe sont trois amies inséparables. L’été, elles traînent leur ennui dans leur petit village en attendant de savoir si leur dossier d’inscription à la fac sera acceptée. Elles veulent quitter un destin tout tracé entre un oncle abuseur, une mère seule inactive et un père violent. Lorsqu’elles apprennent qu’aucune d’entre elles ne pourra étudier à l’université, la colère gronde…
Présenté à Cannes dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs, le film révèle avant tout sa réalisatrice, la franco-kosovar Luàna Bajrami. Cette dernière, à peine âgée de 18 ans, est connue comme actrice notamment dans Les Deux Alfred de Denis Podalydès ou Portrait de la Jeune Fille en Feu de Céline Sciamma. Elle passe derrière la caméra et porte avec fierté les couleurs de son pays natal, première candidate kosovar à la Caméra d’Or en 2021 pour ce film. « Le plus jeune pays d’Europe » est l’objet principal du film tant Luàna Bajrami se plaît à montrer la beauté des paysages et la richesse des traditions. Mais cela est insuffisant face à la soif d’indépendance de la jeunesse rêvant d’une vie meilleure. Malgré un trio d’actrices excellentes et une ouverture sur un pays méconnu, le film peine à garder son souffle jusqu’à la fin.
“Competencia oficial” de Gastón Duprat, Mariano Cohn
Avec Antonio Banderas, Penélope Cruz, Oscar Martínez, Irene Escolar
Sortie Suisse alémanique : 7 avril 2022
Sortie Suisse romande : 11 mai 2022
Sortie France : 1er juin 2022
« Competencia oficial », que le meilleur gagne !
Un homme d’affaire milliardaire espagnol songe à laisser sa marque dans l’histoire. Pourquoi ne pas réunir les meilleurs acteurs dans un film ? Il achète les droits d’un livre nobelisé et contacte une cinéaste atypique Lola Cuevas (Penélope Cruz), une star hollywoodienne Félix Rivero (Antonio Banderas) et un comédien de théâtre radical Iván Torres (Oscar Martínez). Les répétitions commencent… mais rien ne se déroule comme prévu.
Au lieu de s’intituler en français « compétition officielle», le film aurait dû garder la dénomination espagnole de « compétence officielle ». Car c’est bien le sujet du film : trois artistes à l’énorme ego travaillent ensemble et jaugent sans cesse leurs mérites. Avec le sens de l’absurde et de la dérision typique du cinéma espagnol, nous assistons à de merveilleux échanges entre d’excellents acteurs. Aucun temps mort, une tension qui monte, l’affrontement entre des visions et des choix de vie opposés.
Un régal.
« Une histoire provisoire » de Romed Wyder
Avec Felipe Castro, Pooneh Hajimohammadi et Elisabet Johannesdottir.
Sortie Suisse romande : 11 mai 2022
Sortie Suisse alémanique : 9 juin 2022
« Une histoire provisoire », les rencontres improbables d’un airbnb
Sacha n’en peut plus de sa vie actuelle. Il plaque sa petite amie, remet en question son métier de publicitaire et se réfugie dans le airbnb que gère sa sœur à Genève pour réfléchir. Las ! Il doit partager l’appartement avec une iranienne Marjan qui fait face à une crise conjugale et pense rentrer à Téhéran. Alors qu’ils se côtoient sans plaisir, surgit une américaine pleine de tonus qui bouscule ce fragile équilibre.
Dans ces films précédents, Romed Wyder était fasciné par les squats. Dans « une histoire provisoire », le décor principal est un airbnb, nouveau lieu moderne où des gens improbables peuvent se croiser. Ce sera le genevois Sasha, l’iranienne Marjan et l’américaine Mina. L’idée de départ est excellente ; le scénario, coécrit par Romed Wyder et l’iranienne Nasim Ahmadpour, réunit les deux sensibilités et se traduit par un jeu de cache-cache souvent intéressant. Certaines scènes entre les trois protagonistes aux origines si opposées sont bien senties, notamment en rappel à l’antagonisme historique entre l’Iran et les USA.
Une jolie histoire qui trouve doucement son rythme.
