C’est au détour d’une rue dans la vieille ville de Genève, que mon regard fut attiré par une illustration panoramique, poétique et féérique du Bourg-de-Four. L’envie me prit de rencontrer l’artiste…

Une autodidacte… Du pinceau !

Marion, née à Genève le 19 mars 1979,  passe son enfance en France, avec ses parents, son père d’origine tchèque et sa mère suisse, installés à Pougny, dans le pays de Gex. L’origine latine de cette commune « pugnus »  le poing, a peut-être accentué chez Marion, cette volonté innée d’aller sans cesse de l’avant. Après des études en France, elle poursuit à l’université de Genève, de ce fait, son côté franco-suisse la pousse à mettre en avant très souvent, un aspect régionalisme dans ses œuvres picturales.

Marion Jiranek crayonnéElle voulait être archéologue après des études de grec ancien et de latin mais entrepris des études de Lettres, Histoire de l’Art et Histoire en pensant que ce serait utile ! Ce fut le cas, car très souvent sont insérés par petites touches, des clins d’œil historiques dans les œuvres de Marion. Avec deux parents artistes, son père peintre, dessinateur, architecte  et sa mère céramiste, la créativité est un stimulant permanent. C’est tout naturellement qu’elle « tombe » dans la peinture et dès l’âge de deux ans, elle « barbouille » et manie, avec autorisation, les pinceaux dans l’atelier de son père qui lui donnera, par la suite, le goût de l’illustration de ville.

BTL : Le dessin, un mode de vie ?

Marion : C’est surtout un mode de concentration, un virus et je ne peux vivre sans. Autodidacte, je crayonnais tout le temps en cours ou dans les cafés, mes camarades de classe me voyaient toujours dessiner.  Aujourd’hui encore, je ne me sépare jamais de ma petite boîte d’aquarelle. La peinture, le dessin, c’est comme un sport, plus on en fait et plus on apprend et finalement meilleure, on devient ! Il n’y a pas de miracle, ce sont des heures de travail au quotidien.

BTL : Vos sources d’inspiration ?

Marion : Je suis passionnée par l’Art symbolique, l’Art nouveau, l’Art médiéval. Mes dessins intègrent des éléments liés à l’histoire, à la littérature et à l’histoire locale, car « touchante » et « parlante » pour les gens. J’ai intégré aussi depuis l’enfance le côté architecture en côtoyant mon père. Mais il est vrai que l’Art nouveau m’inspire plus particulièrement, car j’insère souvent un esthétisme végétal dans mes dessins. L’Art nouveau, rendait l’art accessible à tous et embellissait chaque objet du quotidien. Aujourd’hui j’aimerais reprendre dans mes œuvres, ce fil conducteur brisé, par la 1ère guerre mondiale.

Marion Jiranek FauneJe suis sensible aussi aux estampes japonaises, la bande dessinée franco belge, les comics américains et les enluminures médiévales… Il y a aussi la forêt, car c’est le lieu où je me sens en sécurité, mais là, je dois être rapide, car je travaille sur place et la peinture doit être débutée et achevée le jour même.

BTL : Beaucoup d’amour dans vos tableaux…

Marion : L’amour est un sentiment fort, positif qui me porte. C’est un équilibre, une douceur de l’existence que j’introduis dans mes tableaux par quelques symboles féeriques, des colombes… Rendre la vie plus belle.

BTL : Et des femmes aussi ?

Marion : Il y a une parité dans mes tableaux, mais dès que je peux placer des personnages historiques féminins, des égéries, je le fais plus volontiers que des personnages masculins. Je redonne vie à certaines personnalités féminines comme Christine de Pisan qui vécut au 14 et 15e siècle, écrivain, poétesse, philosophe, considérée comme la première femme de lettres française ayant vécu de sa plume. Mais aussi  les « Alma Mater » symbole de religion détournée, les suffragettes…

BTL : Du temps pour la vie privée ?

Marion : Du temps pour Julien, mon mari, 10 ans de mariage et 13 ans de vie commune, rencontré à Carouge en 2003. Il cherchait une illustratrice pour des jeux de rôle.  Aujourd’hui, il écrit des nouvelles de science-fiction et enseigne l’économie et le droit. Nous formons un bon team complémentaire avec des projets communs notamment une bande dessinée en ligne pour fin 2016.

Marion Jiranek dessine

BTL : Vous arrivez à vivre de votre talent ?

Marion : Oui, c’est une chance, indépendante depuis 10 ans, je vis de mon art avec des commandes de tableaux d’architecture, de villes, de bâtiments souvent à la demande des mairies. Il y a aussi les séries de cartes thématiques sur les chats, les forêts féeriques, les cantons et paysages romands. Le papier malgré ce que l’on pense, plaît et touche encore le public.

BTL : Votre cheval de bataille ?

Marion : Aujourd’hui, je me sens comme Don Quichotte face aux moulins à vent, je suis le Don Quichotte architecte ! J’aime dessiner des villes, dites anciennes jusqu’au début du 20e, car elles étaient construites dans l’idée de durabilité et d’esthétique. Elles représentent mieux l’homme avec des matériaux plus doux et sont comme les êtres humains, toutes différentes avec un rythme cassé.  Quand on les voit, elles donnent envie de nous y promener pour y découvrir la mixité des habitants. A partir des années 1950, je ne comprends plus l’architecture, elle a dévié dans l’utilitarisme, la rentabilité. Pourquoi aime-ton l’ancien ? Ce n’est pas seulement de la nostalgie, c’est parce qu’on s’y sent bien ! Des fois, je redessine des façades que je trouve mal faites ou je rajoute des immeubles là où il y a des « trous » mais fondus dans le reste, on ne s’en rend même pas compte.

Marion Jiranek AbietumBTL : Vous vivez au Locle dans le canton de Neuchâtel ?

Marion : Eclats de rire… Dans la ville la moins glamour de suisse romande, la pire qui soit, c’est le fin fond du Jura ! Du moins, c’est ce que l’on dit. En fait, c’est un lieu magique, avec un très beau ciel, une très belle lumière, beaucoup de paysages de montagnes, une nature protégée et moins exploitée qu’en plaine. Je suis tombée amoureuse d’un manoir qui se trouve à la jonction de l’Art nouveau et de l’Art déco qui date de 1917 avec un hectare de terrain dont une grande partie est une forêt. C’est un lieu qui m’apaise, que je recommande pour les amoureux de calme, de nature et pour la sympathie des gens.

BTL : Dans une maison-galerie-atelier ?

Marion : A partir du mois de mai, tous les premiers samedis de chaque mois, la maison de 14 pièces et sur 3 étages, de la cave au grenier va se transformer en galerie. Les œuvres exposées dans un contexte meublé seront à vendre auprès du  public. Sinon, on peut venir sur rendez-vous.

BTL : L’occasion d’une découverte de la région ?

Marion : Parfaitement, avec notamment un excellent restaurant à 20 minutes à la Chaux-de-Fonds, « La Ferme des Brandt », situé un peu en dehors de la ville dans une ferme du 17e, un pur bijou avec une cuisine à la française traditionnelle et de très bons produits du terroir. Et pour loger, au Locle, nous avons la « Maison Dubois » et ses chambres d’hôtes, une des plus anciennes maisons d’horlogerie de Suisse qui date de 1785. Ainsi, vous pouvez venir le week-end et découvrir par vous-même le charme de ma région.

BTL : Et sur Genève, une bonne adresse ?

Marion : « L’Echalotte », rue des Rois, une institution, j’y vais régulièrement. C’est rassurant, il y a  toujours les mêmes serveurs et mes « gribouillis » réalisés sur les sets de table sont encadrés dans les toilettes ?. Peut-être qu’un jour, ils vaudront une fortune !

BTL : Un dernier mot ?

Marion : Une anecdote plutôt ! J’ai enfin pu obtenir, Alléluia!  par mariage, ma nationalité française en 2014 ! J’étais peut-être la seule genevoise à être entrée dans le Consulat français avec un tel bonheur, alors que tout le monde essaie d’avoir la nationalité suisse ! Je suis un symbole de réconciliation et d’union entre la Suisse et la France.

Hélène Vibourel, mars 2016

Les œuvres de Marion sont en vente à la Galerie Burgener, rue de l’Hôtel-de-Ville à Genève, dans sa maison-atelier et via son site www.marionjiranek.com, vous pouvez également la contacter par mail marion@marionjiranek.com.

Quelques tableaux sont présentés à la Palette Carougeoise qui aura lieu du 5 au 13 mars 2016 www.palettecarougeoise.ch

Marion Jiranek Carouge

Les bonnes adresses de Marion :

www.fermedesbrandt.ch

www.maisondubois.ch

www.restaurant-echalotte-geneve.ch

www.ecrin-d-art.ch